Mon regard sur… Le premier enjeu du couple
Patricia Montaud, qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser de si près au couple ?
C’est le secteur de la vie humaine qui me passionnait le plus et, en même temps, le lieu où j’ai rencontré le plus de difficultés ; j’y ai donc beaucoup appris. N’est-ce pas une étonnante traversée que toutes ces années passées côte à côte avec un même partenaire ?
Qu’est-ce que la vie cherche à nous apprendre à travers le couple ? Ne serait-il pas attendu un pas d’évolution pour l’homme et pour la femme? Se peut-il alors que cette étape soit parfois tumultueuse, voire même catastrophique, uniquement parce qu’il nous manque « la notice d’emploi » ?
Si aujourd’hui je peux présenter quelques réponses concrètes, c’est parce que j’ai été patiemment accompagnée moi-même dans cette quête.
Comme toutes les adolescentes, j’étais habitée par ces questions :
– Pourquoi, au fil des années, la plupart des couples se dégradent-ils ? Pourquoi au début voit-on toujours l’autre plein de qualités, puis avec quelques défauts, pour finir un beau jour par ne voir plus que ses imperfections ?
Comment, aujourd’hui, répondez-vous à toutes ces questions ?
J’ai entraperçu les réponses lorsque j’ai compris de quoi était composé l’amour. Il semble fait de deux forces : une force passive et une force active.
La force passive est cette attirance inexplicable que l’on éprouve pour quelqu’un de l’autre sexe. L’explication de tous nos problèmes de couple prend racine dans la nature étrange de cette attirance. Même si mon côté romantique a eu du mal à l’admettre, nous sommes attirés par celui ou celle qui sera le plus apte à stimuler notre passé, avec lequel nous sommes plus ou moins bien réconciliés.
C’est plus fort que nous : nous sommes inconsciemment attirés par celui ou celle qui répète le plus fidèlement notre histoire, et qui, par conséquent, est le mieux programmé à réveiller nos vieilles blessures. Alors, arrêtons d’être déçus : malgré les apparences, l’amour passion du début n’est pas l’attirance de deux corps ou de deux esprits, mais l’attirance de deux traumatismes.
Et si l’amour est aveugle, c’est bien là !
Quoi d’étonnant qu’un beau jour nos yeux s’ouvrent, et qu’après les qualités, nous nous mettions à ne voir plus que les défauts de notre « grand amour » !
Tout semble bien compromis dès le départ ! On a du mal à imaginer qu’une issue soit possible…
Là est le premier enjeu du couple : passer d’un amour passif à un amour actif.
Ah ! La belle affaire que d’aimer les qualités de l’autre ! Il ne s’agit pas d’amour, mais de simple bon sens. Par contre, rester avec l’autre malgré ses imperfections, celles qui réveillent méthodiquement les vieilles blessures de notre passé…
La force active de l’amour est la lente conquête de tout ce qui nous déplait chez notre conjoint.
Mais comment s’y prendre concrètement ?
Poursuivons simplement notre logique : si ce qui nous agace chez l’autre n’est pas ses imperfections, mais le fait qu’elles viennent réveiller notre propre histoire traumatique, le problème à résoudre, c’est donc nous !
Ce qui nous fait mal, ce n’est donc pas son imperfection, mais la nôtre… notre conjoint n’y est pour rien ! Nous l’avons même précisément choisi pour ça ! Il ne sert donc à rien de changer de mari ou de femme puisque, quel que soit le « décor extérieur », nous portons notre passé en nous !…
Osons le dire, haut et fort : ce n’est pas l’autre qui fait notre bonheur, et il est donc vain de chercher l’âme-sœur ! Notre âme-sœur, c’est nous qui la forgeons, pas à pas. Il n’y a pas de prince charmant ni de belle princesse qui tombe tout prêt dans notre chaumière. Il est un conte de fée encore plus merveilleux où le héros, par amour, transforme la bête en belle. Voilà le premier enjeu du couple. Nos propres imperfections vues et aimées sont la plus grande assurance-vieillesse du couple.
Il n’y a donc pas de grand amour possible sans réconciliation avec notre propre histoire. Là où l’autre nous insupporte se trouve l’indication du programme de notre propre transformation personnelle. L’autre devient alors, en quelque sorte, notre « maître ».
Tout reproche contre notre conjoint est donc une impasse, une paresse spirituelle, un refus de notre propre accomplissement.
Mais savoir retourner le problème vers soi est un long et patient cheminement qui ne peut se faire sans un chemin spirituel assidu.
L. Je trouve que les relations entre les hommes et les femmes ne sont pas faciles.
– Ici aussi, il n’y a qu’une voie pour toi :
DONNER. Et non recevoir.
C’est de LUI seul que tu peux recevoir.
Aux autres tu as à donner de l’aide, tu as à donner.
Tout te sera donné, dont tu auras besoin.
Aussi longtemps que tu ressens un manque,
C’est que tu veux recevoir.
L. (soulagée). Que c’est clair !
– Tout t’est donné, si tu ne quittes pas le chemin,
car le chemin est tout.
Dialogues avec l’ange – Entretien 14 avec Lili (p.83)